Un rapport de l’OIT confirme la faiblesse de la reprise

Prudence par Evelyne Salamero

Les demandeurs d’emploi sont souvent contraints d’accepter des offres en deçà de leur qualification. © Sylvain THOMAS / REA

La reprise a été générale en 2017 mais la croissance économique mondiale devrait rester faible et le chômage élevé ces deux prochaines années prévient l’OIT, qui souligne aussi la mauvaise qualité des emplois créés.

Le rapport annuel de l’Organisation internationale du travail (OIT) « Emploi et questions sociales dans le monde, tendances 2018 » sonne comme un appel à la prudence. Certes, la croissance économique mondiale a augmenté de 0,4 % en 2017 pour atteindre 3,6 % contre 3,2 % en 2016, son plus bas niveau en six ans. Mais elle devrait se stabiliser en deçà de 4 %, contre des taux autour de 5 % avant la crise. Cette faiblesse résulte de celle des investissements fixes et des mesures de stimulation, explique le rapport.

Les hausses de salaires notamment restent maîtrisées, ce qui compromet la relance de la demande globale et par conséquent du marché du travail, souligne l’OIT.

Résultat : s’il apparaît que le taux de chômage mondial, après trois années de hausse, devrait baisser légèrement, de 0,1 %, pour s’établir à 5,5 % en 2018 contre 5,6 % en 2017, il n’en restera pas moins élevé, avec 192 millions de chômeurs en 2018. Un nombre qui devrait d’ailleurs augmenter de 1,3 million en 2019, même si le taux de chômage devrait rester pratiquement inchangé du fait de l’arrivée d’un nombre croissant de personnes sur le marché du travail.

Boom des emplois à temps partiel, surtout en zone euro

Parmi les raisons qui empêchent une progression suffisante des salaires, l’OIT pointe, outre les politiques anti-inflationnistes et la lenteur de la croissance de la productivité, la mauvaise qualité des emplois créés. Depuis le début de la crise en 2008, une grande partie de ceux-ci sont des temps partiels que les salariés ont souvent été contraints d’accepter faute de mieux. La zone euro est particulièrement concernée avec un taux d’emplois à temps partiel de 21, 6 % en 2016 (contre 19,5 % pour l’ensemble de l’Union européenne) au lieu de 18,7 % en 2008.

Pas moins de 30 % des salariés concernés cherchaient en réalité un emploi à temps plein. La part des temps partiels contraints se révèle particulièrement élevée dans la plupart des pays du sud de l’Europe, dépassant les 60 %, et même les 70 % en Espagne, en Italie et en Grèce.

L’OIT s’inquiète également du fait que les salariés ayant suivi des études secondaires et supérieures occupent de plus en plus souvent des emplois en deçà de leur qualification.

Le rapport soulève aussi la question du vieillissement de la population, qui entraînera inévitablement une augmentation de l’âge moyen des actifs, ce qui mettra à rude épreuve la capacité des travailleurs à suivre l’innovation et les changements structurels sur le marché du travail, et appelle à développer l’apprentissage tout au long de la vie.

 

Focus : Le développement des services ne va pas tout régler
L’emploi manufacturier devrait encore diminuer dans les pays développés et n’augmentera que marginalement ailleurs. L’OIT met en garde contre la désindustrialisation précoce : les pays pauvres voient leur emploi industriel diminuer avant d’avoir atteint les stades de développement des plus riches. Le développement des services pourrait accroître l’incidence de l’emploi à temps partiel dans les pays développés. Dans les pays en développement, les conditions de travail sont plus mauvaises dans les services que dans l’industrie.

Evelyne Salamero Ex-Journaliste à L’inFO militante