FO déterminé à combattre tout accord de performance collective chez Generali

Assurances par Clarisse Josselin, FEC FO

Conférence de presse le 7 juin à la fédération FEC-FO, avec, de droite à gauche, Sébastien Busiris, secrétaire général de la FEC-FO, Georges de Oliveira, secrétaire de la section fédérale des assurances FEC-FO, Jean-Simon Bitter, secrétaire fédéral et Didier Storn, représentant le CGT.

Début mai, les syndicats FO et CGT avaient fait annuler en appel un accord sur le temps de travail chez l’assureur Generali France. Le 29 mai 2018, ils ont porté plainte contre la direction pour chantage et entrave. Et FO est bien déterminé à poursuivre le combat contre tout accord de performance collective dans l’entreprise comme dans la branche.

Démêler le vrai du faux dans le conflit qui oppose FO et la CGT à l’assureur Generali France, tel était l’objectif de la conférence de presse organisée le 7 juin par la section des Assurances au siège de la fédération des employés et cadres FEC-FO.

L’affaire démarre le 17 décembre 2015, avec la signature par les syndicats CFDT, CFE-CGC et Unsa d’un accord sur le temps de travail chez Generali. Il concerne les personnels des directions des métiers supports et des métiers opérationnels (DMSMO). Il leur impose jusqu’à 5 jours de travail supplémentaires – ou d’équivalents en heures – sans aucune contrepartie salariale. La direction prétend que cet accord s’applique sans nécessiter la signature d’un avenant aux contrats de travail.

Cette inversion de la hiérarchie des normes, c’est un accord de performance collective deux ans avant les ordonnances Macron, dénonce Jean-Simon Bitter, secrétaire fédéral de FEC-FO Assurances. Nous avions prévenu la direction qu’elle était dans l’illégalité, mais elle a persisté.

Le télétravail n’est pas remis en cause

FO, rejointe par la CGT, saisit le TGI de Paris, qui annule l’accord dans un jugement du 21 mars 2017. La direction fait appel. Elle demande aussi de lier cinq autres accords signés le 17 décembre 2015, notamment sur le télétravail, pour les rendre indissociables, alors qu’ils ne sont pas remis en cause par FO.

Le 3 mai 2018, la Cour d’appel de Paris confirme l’annulation de l’accord sur le temps de travail. Les autres accord deviennent inapplicables mais pas caducs. En clair, il n’y a pas d’effet rétroactif, pour ceux qui en bénéficiaient déjà, le télétravail n’est pas remis en cause, assure le secrétaire fédéral. C’est une victoire selon FO et la CGT.

Mais le 7 mai, la DRH Sylvie Peretti adresse un communiqué interne à près de 5 000 salariés. Consciente des conséquences négatives pour les collaborateurs et pour l’entreprise, la Direction ne prendra pas la décision de signifier officiellement ce jugement [NDLR : l’arrêt de la Cour d’appel] aux organisations syndicales ce qui aurait pour effet, au plan juridique, de le rendre exécutoire, écrit-elle dans ce document remis aux journalistes lors de la conférence de presse.

La direction nous demande de renoncer à l’exécution d’une décision de justice

Si l’initiative venait des organisations syndicales contestataires FO et CGT, les conséquences immédiates seraient l’arrêt immédiat du télétravail, à domicile et en télécentre, pour les 1 100 collaborateurs actuellement concernés, menace la DRH.

Elle nous demande de renoncer à l’exécution d’une décision de justice et menace de dresser contre nous de nombreux salariés, c’est du chantage, poursuit Jean-Simon Bitter. C’est aussi de la folie. Elle ne se rend pas compte que dans une compagnie d’assurance, on gère des contentieux, et des salariés savent lire une décision de justice ?

Loin d’être isolés, FO et la CGT se satisfont d’être soutenus par les salariés. Lors d’une assemblée générale organisée le 17 mai à Saint-Denis dans une salle comble, plusieurs revendications sont votées : la suppression des clauses d’indissociabilité, le retour à la durée du travail de 2003 et la compensation sous forme de salaires ou de congés des jours ou heures travaillés non payés depuis janvier 2016. Le 29 mai, FO et la CGT déposent une plainte auprès du TGI de Paris contre la DRH et Generali France pour chantage, entrave, discrimination et atteinte à la liberté syndicale. Le chantage consiste à menacer sans base légale de stopper le télétravail, ça a créé la panique chez Generali, précise le secrétaire fédéral.

FO revendique une compensation salariale de 2,5%

Mais la direction persiste et signe. Mi-mai, elle convoque de nouveau les syndicats pour négocier un nouvel accord sur le temps de travail. C’est quasiment le même texte qu’en 2015, avec toujours les journées ou heures travaillées non payées, dénonce Jean-Simon Bitter. Il est ajouté qu’il s’inscrit autant que nécessaire dans le cadre de l’article L.2254-2 du Code du travail. Il s’agit donc d’un accord de performance collective issu des ordonnances Macron.

Ce nouvel accord a été signé le 11 juin par les mêmes trois syndicats : CFDT, CFE-CGC et Unsa. Ils n’ont même pas le courage de dire que le travail augmente de 2,5% et ils ne parlent pas de contrepartie salariale, donc pour nous cette dernière est due, poursuit-il. Nous revendiquons une hausse de 2.5% en plus d’une augmentation générale.

Des dossiers déjà déposées aux prud’hommes

Le syndicat FO demande l’ouverture d’une négociation. Nous sommes bien déterminés à combattre cet accord par l’action syndicale et par tout moyen judiciaire, avertit Jean-Simon Bitter. Sur la compensation du travail gratuit depuis janvier 2016, des dossiers ont déjà été déposés aux prud’hommes.

Dans un communiqué, FEC-FO Assurances compare ces accords de performance collective à une machine de guerre contre les droits des salariés. Elle prévient qu’elle n’acceptera aucun accord de ce type et s’opposera à leur mise en œuvre.

 

Les accords de performance collective, un recul historique inadmissible

Un accord de performance collective permet d’augmenter le temps de travail, de baisser les salaires et d’imposer une mobilité professionnelle ou géographique au sein de l’entreprise sans contrepartie salariale. Il se substitue de plein droit aux clauses contraires ou incompatibles du contrat de travail, la signature d’un avenant n’est pas nécessaire. Pour être valable, il doit être signé de syndicats qui ont obtenu plus de 50% des voix aux dernières élections. Le salarié dispose d’un mois pour refuser la modification de son contrat de travail résultant de l’application de l’accord. Dans ce cas, l’employeur peut le licencier pour une cause réelle et sérieuse. Pour l’employeur, un tel accord ne vise pas seulement à préserver et développer l’emploi mais aussi de répondre aux nécessités liées au fonctionnement de l’entreprise.
Par cette notion fourre-tout, les possibilités de recourir à ces accords de performance collective sont démultipliées, ce qui pour FO constitue une atteinte à la force obligatoire des contrats, dénonce le Congrès confédéral dans sa résolution générale. Il condamne l’inversion de la hiérarchie des normes et la disparition quasi intégrale du principe de faveur. Force Ouvrière n’acceptera jamais un tel recul historique conduisant au retour aux relations sociales du capitalisme sauvage avec un patron tout-puissant et un tâcheron sans droits, prévient-il.

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante

FEC FO Employés et Cadres